vendredi 25 juin 2010

Pierre Filliquet, "Les doigts gelés", du 25 juin au 18 juillet 2010 au CEAAC de Strasbourg




Le passage est le maître mot de l'exposition proposée par Pierre Filiquet au CEAAC de Strasbourg. Le passage entre la vie et la mort, la beauté et le morbide, la fragilité et la présence, le hasard et la précision, le minéral et l'animal. Pierre Filiquet nous met en transition entre des opposés, entre des inconciliables qui s'épousent en douceur pour créer un moment de poésie qui nous bouleverse dans un souffle, dans un murmure à nos émotions.

Les crânes fracturés nous happent dans le monde de la mort. Les formes évoquées dans les lavis, fragments d'anatomie posés sur le papier par le charbon et l'eau, renvoient à cette même prose. Et pourtant, rien n'est fait pour satisfaire nos appétits morbide, rien d'offensant n'est présenté. La naturalité des fragments permet l'évocation de notre état mortel, de notre passage dans la vie. Les aléas du temps sont présents dans ces bouts d'anatomie, par la gravure de l'artère faite à l'intérieur du crâne, à la colonne vertébrale déformée par la maladie. Ces traces deviennent graphisme et dessin, le corps fragmenté et asséché est un objet à contempler. Il devient minéral et nous rappelle la matière dont nous sommes faits.

A travers cette exposition, l'artiste construit des ponts entre des univers lointains, entre la culture asiatique qui le nourrit et la culture occidentale qui l'a bercé. Il fait naître un nouvel espace qui condense le temps de la vie et de la mort tout autant qu'il condense les noirs du fond de ses photographies.
Le lien entre l'état minéral et l'humain réalisé renvoie à la composition du corps fait d'une matière organique qui deviendra poussière, et qui comme les fossiles, prendra l'aspect de la pierre.

Par la poésie et la force de ses oeuvres, Pierre Filiquet nous fige dans un temps au delà de ces conventions qui voudraient que la mort nous effraie pour nous inviter à découvrir la beauté silencieuse de notre propre matérialité.

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